Entrevue avec une journaliste

REPÈRES ta carrière (Entrevues)
12 septembre 2021
Entrevue avec une journaliste

Les médias sociaux et les chaînes de nouvelles en continu ont apporté une nouvelle réalité dans notre quotidien où l'information circule à une vitesse impressionnante. Que vous allumiez la télévision ou que vous alliez sur internet, vous êtes instantanément informé de ce qui vient de se passer. Pour un journaliste, la diffusion de nouvelles d’intérêt public ne peut se faire sans une démarche rigoureuse. Danny Côté, l'un des visages importants de l'information de TVA Québec, nous entretient sur ce métier qui la passionne et qu'elle exerce depuis de nombreuses années. 

Danny Côté
Journaliste, chef de pupitre et chef d’antenne
TVA Québec
Question
Comment avez-vous choisi votre profession et quel a été votre parcours?
Réponse

Au terme de mes études secondaires, j’ai pris la décision de m’inscrire dans un programme qui s’appelait « lettres et communications » au cégep car ma matière préférée à l’école a toujours été le français. Nous faisions des petites émissions de télévision, des bulletins de nouvelles et j’assistais à des spectacles pour en faire les critiques. Ça m’a vraiment donné le goût de me diriger vers le journalisme. Dès lors, je me suis impliquée à la télévision communautaire CCAP.Tv où je participais à diverses émissions. J’allais notamment couvrir les séances du conseil municipal, à Stoneham, où j’habitais. La télévision s’est imposée d’emblée pour moi parce que j’ai tout de suite utilisé ce médium pour travailler en journalisme. 

J’ai poursuivi mes études au baccalauréat en communications à l’Université Laval où je me suis spécialisée en presse écrite car je tenais à diversifier mes champs de compétence. J’ai d’ailleurs intégré l’équipe du journal étudiant L’Exemplaire. De retour d’un stage à Paris, j’ai eu l’occasion de travailler à TQS Québec, qui n’existe plus sous ce nom aujourd’hui, où je faisais quelques remplacements dans la salle de nouvelles qu’ils avaient à l’époque. Afin d’avoir accès à un emploi plus régulier, j’ai accepté un poste à la station de Trois-Rivières où j’ai continué de travailler pour TQS jusqu’en 2008. Lorsque la chaîne a fermé la salle des nouvelles, j’ai eu la possibilité de revenir dans la Ville de Québec pour me joindre, cette fois-ci, à l’équipe de TVA Québec. Cela fait maintenant plus de 21 ans que travaille dans le domaine et je prends toujours autant de plaisir à défendre l’importance de l’information régionale. 

Question
À quoi ressemble le travail d’une journaliste?
Réponse

Le type de média pour lequel un journaliste travaille détermine la réalité à laquelle il sera confronté. À la radio, il n’y a pas d’aspect visuel à se préoccuper comme à la télévision et dans le domaine de la presse écrite, il doit jongler avec des dates de tombée plutôt que de vivre des reportages en direct comme je suis appelée à faire. Bien que nous ayons la possibilité de traiter des sujets variés, chaque journaliste développe généralement son propre créneau. Certains vont s’occuper du domaine de la santé alors que d’autres vont couvrir davantage les affaires policières ou les faits divers. L’actualité ne prend jamais de pause alors ça fait partie de mon travail d’être informée en tout temps. La vitesse à laquelle voyage l’information présentement implique d’avoir une grande rigueur à ce niveau donc avant d’aller au travail, je lis les différents journaux et même lorsque ma journée est terminée, je regarde tout ce qui se déroule sur les réseaux sociaux, les fils de presse, etc. 

Nous fonctionnons beaucoup en mode collaboratif dans notre équipe. Chacun des journalistes à l’horaire va couvrir les événements de la journée qui lui sont attribués. Par exemple, s’il y a une conférence de presse du Maire Labeaume, c’est moi qui irai à cet événement car je fais beaucoup de couverture de politique municipale. Pendant la conférence, je vais noter les éléments essentiels dans un carnet afin de bien résumer l’information une fois en ondes. Même si je n’ai pas de texte et que je dois parler de manière spontanée, je peux toujours m’y référer afin de ne pas oublier les points importants à mentionner. Parfois, une conférence de presse n’est pratiquement pas terminée et je suis déjà en direct au bulletin de nouvelles pour transmettre l’information recueillie

Mon emploi est particulier comparativement à ceux d’autres journalistes car j’occupe également les fonctions de chef de pupitre, de chef d’antenne et de présentatrice de nouvelles selon les besoins de la chaîne de télévision. Je peux, par exemple, travailler une journée sur le terrain en tant que journaliste alors que le lendemain je serai à la barre du bulletin de nouvelles au studio de TVA. Comme chef de pupitre, c’est moi qui décide de l’ordre des nouvelles qui seront présentées aux téléspectateurs. Je fais moi-même l’ébauche du bulletin à l’aide d’un logiciel qui permet de planifier quel journaliste va intervenir à tel moment et quels sujets seront abordés en ondes. Lorsque je suis sur le plateau de télévision et que je présente le tout devant la caméra, j’occupe plutôt les fonctions de chef d’antenne. Je lis alors un texte qui défile devant moi et j’interviens avec les divers journalistes et les collaborateurs pendant toute la durée du bulletin.
 

Question
Qu’est-ce que vous aimez le plus et le moins dans votre travail?
Réponse

Les sujets sont toujours différents et c’est stimulant car j’apprends de nouvelles choses à tous les jours. Mon travail m’offre également la chance de rencontrer des gens exceptionnels et de faire partie de moments importants de l’histoire régionale. Je suis constamment impressionnée de voir des artistes, des premiers ministres ou des personnes qui font partie de l’élite et d’avoir à les interviewer. Prochainement, je vais débuter la couverture de la campagne électorale municipale de la Ville de Québec et cela va m’amener à assister à la soirée électorale. Je me trouve bien privilégiée d’avoir la chance de vivre ça.

Nous avons accès à de l’information de qualité et ce, à travers différents médias. Malgré cela, certaines personnes croient que nous ne sommes pas neutres dans nos propos. Je trouve ça dommage car, même si je travaille pour une station privée, j’ai vraiment la possibilité d’exposer différents points de vue sans jamais être influencée par qui que ce soit, pas même par mon patron. De plus, il est parfois difficile de faire son travail lorsqu’on doit couvrir certains événements malheureux. Plusieurs choses peuvent venir heurter nos valeurs ou nous affecter comme, par exemple, le fait d’interviewer une mère qui vient de perdre son fils dans une noyade. Nous ne sommes pas insensibles à ce genre d’événement mais nous avons un travail à effectuer et nous devons y mettre le focus.
 
 

Question
Quels sont les aspects méconnus de votre métier?
Réponse

Mon travail ne consiste pas toujours à être devant la caméra. Je fais également le montage de mes propres reportages. Lors de cette étape, je peux enregistrer, entre autres, une voix hors champs que j’ajouterai à des images tournées par le caméraman qui m’a accompagné au préalable sur le terrain. Il est également de notre responsabilité de contacter les intervenants que nous désirons interviewer. Par exemple, si le sujet sur lequel je travaille porte sur un traitement prometteur du cancer, je vais tenter de trouver un médecin qui pourra en parler avec moi en ondes. Si c’est impossible, je pourrai faire alors une recherche parmi les entrevues qui ont été réalisées plus tôt le matin, par exemple, avec mon collègue Jean-François Guérin sur les ondes de LCN. Nous avons accès au contenu qui est diffusé sur nos ondes et nous pouvons, au besoin, utiliser certains segments pour bonifier nos reportages.

Il arrive parfois que l’information que nous avons préparée change en cours de route, qu’il y ait de nouveaux éléments à prendre en considération ou encore que nous devions remplacer un intervenant à quelques minutes d’intervalle. Lorsque nous sommes en ondes, le stress est constant. Livrer ce qu’on a dire est un défi continuel car il faut faire abstraction de tout ce qui se passe autour de nous. Il faut vraiment être à l’écoute de l’autre lorsqu’on interview une personne car il est facile de se faire déconcentrer par le réalisateur, par exemple, que l’on entend parler dans notre oreillette ou encore par quelqu’un qui vient faire une blague derrière nous alors que nous sommes en direct sur le terrain devant des milliers de téléspectateurs. Même si je suis quotidiennement sous les projecteurs, j’ai une grande timidité avec laquelle je dois composer. C’est un paradoxe que je remarque fréquemment chez les personnes qui travaillent dans le domaine des communications.  
 

Question
Qu’est-ce que vous diriez à une personne qui désire faire ce choix de carrière?
Réponse

Dans ce métier, la réputation d’un journaliste fait foi de tout et la véracité des faits que nous transmettons au public est extrêmement importante. Avec tout ce qui est disponible sur Internet, il faut redoubler d’ardeur afin de vérifier les sources d’information que nous utilisons. Veiller à bien s’exprimer est sans aucun doute un point primordial. À cet effet, il faut avoir une bonne capacité de communication et maîtriser l’art de raconter les choses pour bien exposer les événements, captiver le public et l’aider à se faire une idée sur un sujet en particulier. Pour quelqu’un qui est très curieux, enquêter deviendra un automatisme mais il faut aimer vouloir le faire jours après jours. Dénoncer publiquement certaines situations est un de nos rôles et nous devons être en mesure de faire face à la critique. De plus, ce métier vient d’emblée avec un certain vedettariat et il est important d’être à l’aise avec cela. Les gens sont habitués de me voir à la télévision et ils me reconnaissent désormais partout où je vais. Je fais toujours attention à l’image que je projette, même quand je vais seulement faire mon épicerie. Ce métier ne nous quitte jamais vraiment. 

Il y a d’autres avenues possibles pour quelqu’un qui est attiré par le journalisme mais qui hésite à travailler dans le domaine télévisuel car il n’est pas à l’aise devant la caméra. Nous avons, par exemple, des rédacteurs dans notre équipe qui travaillent dans la salle de nouvelles et qui composent des textes journalistiques que nous utilisons en ondes pour divers reportages. Il y a une multitude de possibilités d’emploi qui peuvent être très intéressantes dans ce domaine et, pour ma part, faire mes débuts dans une station de télévision communautaire a été très formateur. Cet environnement m’a aidé à développer plusieurs compétences et j’ai pu me familiariser avec l’équipement audiovisuel en place qui est d’ailleurs très représentatif de ce que nous utilisons dans les plus grandes chaînes. Selon moi, aller chercher une bonne base d’expérience est vraiment la clé du succès.

Entrevue réalisée par Pascale-Andrée Boivin