Entrevue avec une technicienne en éducation spécialisée

REPÈRES ta carrière (Entrevues)
8 octobre 2019
Photo de Isabelle Savard

Le travail en éducation spécialisée permet d'oeuvrer dans plusieurs milieux et d'intervenir auprès de diverses clientèles. Nous avons eu le plaisir de rencontrer Isabelle Savard, technicienne en éducation spécialisée en pratique privée chez Psy & Cie à Québec. Elle nous a parlé de son cheminement de carrière auprès des jeunes et des adolescents et nous a présenté les divers aspects de cette profession très diversifiée.

Isabelle Savard
Psy & Cie
Technicienne en éducation spécialisée
Question
Comment avez-vous choisi votre profession et quel est votre parcours de carrière?
Réponse

Au moment où j’ai terminé mon secondaire à la fin des années 80, l’informatique commençait à prendre de plus en plus de place sur le marché du travail. Je me disais « jamais dans ma carrière on ne me remplacera par un ordinateur ou un robot!». La communication et le contact avec les gens étaient trop importants pour moi. J’aimais écouter les gens et les personnes se confiaient facilement à moi. J’ai donc envisagé une carrière dans la relation d’aide. Après avoir participé à une journée Étudiant d’un jour dans un cégep de la région de Québec, j’ai eu le coup de foudre pour la profession de technicienne en éducation spécialisée.

J’ai effectué différents stages durant ma formation. Celui que j’ai fait auprès des enfants aux prises avec des déficiences intellectuelles a fait en sorte que j’ai décidé de me spécialiser auprès de la clientèle jeune. Une fois mon diplôme en poche, j’ai rapidement été embauchée dans une commission scolaire. Après avoir travaillé plus de 20 ans pour ce type d’employeur, je me sentais prête à relever de nouveaux défis. J’ai donc quitté la commission scolaire il y a deux ans pour partir à mon compte. J’offre maintenant mes services à une clientèle jeune de 4 à 20 ans dans une clinique privée multidisciplinaire à Beauport.

Question
À quoi ressemble une journée type de travail?
Réponse

Les tâches en éducation spécialisée varient énormément selon le milieu de travail dans lequel on évolue et les clientèles avec lesquelles on intervient. Par exemple, lorsque j'étais à l'emploi d'une commission scolaire, je pouvais être attitrée à une classe régulière où je travaillais en équipe avec l’enseignante durant la journée et j’intervenais en fonction des besoins. Mon horaire était donc le même que celui des élèves. À d’autres moments, j’étais plutôt attitrée à l’école et je devais me déplacer dans les classes lorsqu’il y avait des besoins. Mon horaire était encore là très semblable à celui des élèves. Lorsque j’intervenais dans des classes avec des jeunes en situation de handicap, je devais fréquemment les aider dans leurs déplacements, pour aller à la toilette, pour s’alimenter, etc.

Depuis que je suis en pratique privée, je peux organiser mon horaire selon mes besoins. Je détermine les jours et les heures où je rencontre des clients, ce qui est très différent des autres milieux de pratique. Une partie de mon temps est également réservé à la préparation de matériel et d’activités. Lorsque j’étais en milieu scolaire, certaines périodes ou journées pédagogiques étaient destinées à cette activité. Il m’arrivait aussi à l’occasion de travailler chez moi. Maintenant que je suis en pratique privée, je dois prévoir ce temps dans mon horaire à la clinique.

Il n’existe donc pas de journée type de travail en éducation spécialisée. Dans d’autres milieux tels que les centres jeunesse ou les maisons des jeunes, du travail de soir ou de nuit peut être exigé.

Question
Qu’est-ce que vous aimez le plus et le moins dans votre travail?
Réponse

Ce que j’aime le plus dans mon travail, c’est le contact avec les enfants et le fait de les amener à exploiter leur potentiel au maximum et de leur faire vivre des expériences qui vont les aider et les rendre plus heureux. Lorsque je vois un enfant sourire parce qu’il se sent mieux, ça n’a pas de prix à mes yeux et c’est ma plus belle récompense. Le fait de pouvoir gérer mon horaire comme je le désire en pratique privée est également un élément que j’aime beaucoup.

Parfois, malgré toute notre bonne volonté, nos efforts et toutes les techniques possibles, nous sommes incapables d’amener l’enfant à un résultat. Rien ne fonctionne, alors nous devons le référer à d’autres professionnels. Ce sentiment d’impuissance est l’élément que j’aime le moins dans mon travail.

Le temps de préparation pour le matériel, la rédaction des observations et l’élaboration des plans d’intervention sont également des éléments que j’aime moins, surtout dans le milieu scolaire où le temps accordé à cette tâche par l’employeur est nettement insuffisant.

Finalement, en pratique privée, la difficulté que je rencontre par moment à recruter de la clientèle est un aspect que j’apprécie moins. Les gens connaissent encore peu les services d’éducation spécialisée au privé car nous sommes peu nombreux à pratiquer de cette façon. Plus les gens connaîtrons les services que nous offrons, plus il sera facile d’avoir de nouveaux clients.

Question
Est-ce que votre travail exige des capacités particulières?
Réponse

Dans le domaine de l’éducation spécialisée, il faut absolument être capable de travailler en équipe, car la plupart du temps nous sommes appelés à collaborer avec d’autres professionnels. Lorsque nous intervenons auprès des clients, il est important d’être dynamique, empathique, de rester alerte, d'avoir de l'entregent et de l'initiative, de faire preuve d’une très grande écoute, d’une bonne capacité de communication et d'être respectueux des valeurs des autres.

Il faut également faire preuve de créativité dans nos interventions ainsi que dans l’élaboration de matériel. Avec certaines clientèles telles que les élèves en situation de handicap ou ceux ayant des troubles de comportement, il est nécessaire d’avoir une certaine force physique afin d’être en mesure d’aider le jeune à se déplacer, par exemple, ou encore pour maintenir un élève en crise. Il est également important d’être en mesure de créer un lien de confiance avec le client ainsi qu’avec la famille au besoin.

Question
Avez-vous des suggestions à donner à quelqu’un qui voudrait faire ce choix de carrière?
Réponse

Pour effectuer ce travail et aider efficacement les autres, je crois qu’il faut tout d’abord se sentir bien avec soi-même. Il faut également avoir le goût d’aider les gens étant donné que c’est l’essence même du travail.

Une capacité à ne pas se laisser envahir par les difficultés des autres est également nécessaire. Comme dans tous les métiers en relation d’aide, on doit éviter d’apporter les problèmes de nos clients à la maison si l'on veut préserver notre santé psychologique. On doit également éviter de prendre les clients en pitié, ce qui ne serait pas constructif et aidant dans le processus.

Une très grande capacité d’adaptation est requise pour exercer ce métier. Par exemple dans le milieu scolaire, il est fréquent d’être affecté à une école différente chaque année et de ne pas se voir attribuer le même nombre d’heures. Il m’est souvent arrivé de combler mon horaire par de l’aide aux devoirs ou d’autres tâches parce que je n’avais pas toujours un horaire à temps plein à l’école.

Finalement, j’encouragerais toutes les personnes qui sont attirées par ce métier à foncer, c’est une très belle profession pour ceux qui désirent aider les autres et croyez-moi, les besoins sont là!

Entrevue réalisée par Julie Gauvin c.o.