Entrevue avec un technicien du son

REPÈRES ta carrière (Entrevues)
15 avril 2020
Entrevue avec un technicien du son

Quelques jours avant le début de la crise de la COVID-19, nous avons eu la chance de rencontrer François Chamberland, technicien du son de la région de Québec, afin d'en apprendre davantage sur son métier. Malheureusement, la fermeture temporaire des salles de spectacles durant la présente crise a des répercussions énormes sur les travailleurs de ce domaine, dont les techniciens du son. Cependant, ils seront de nouveau en demande lorsque cette crise sera terminée et que les gens auront besoin de sortir afin de se divertir!

François Chamberland
FC Audio
Technicien du son
Question
Comment avez-vous choisi votre profession et quel a été votre parcours?
Réponse

La musique a toujours été une passion pour moi. Dès l’âge de 12 ans, je m’amusais à enregistrer des démos. Dans un premier temps, j’ai fait une formation en ébénisterie que j’ai beaucoup aimée, mais qui ne me comblait pas complètement. En fait, j’ai réalisé que je n’aimais pas travailler constamment dans le bruit des outils, mais que je préférais davantage entendre de la musique!  À la suite d’un voyage de quelques mois dans l’Ouest canadien, qui m’a amené à côtoyer plusieurs musiciens, j'ai décidé de poursuivre ma passion et de me diriger dans le domaine de la sonorisation. À mon retour, j’ai donc fait un AEC en enregistrement et sonorisation au Campus Notre-Dame-de-Foy.   

Au début, je désirais me spécialiser dans l’enregistrement en studio. Après avoir obtenu une subvention du programme Jeunes volontaires, j’ai pu enregistrer un premier démo avec 15 groupes de musique différents. Par la suite, un de ces groupes m’a demandé de les dépanner et de faire la sonorisation pour eux dans un resto-bar de Lévis et j’ai accepté. À la suite de cette soirée, le propriétaire de l’endroit m’a offert un emploi régulier de technicien du son dans son établissement. J’effectue maintenant ce travail dans plusieurs restos-bars de la région, pour plusieurs salles de spectacles ainsi que pour le Festival d’été de Québec, et ce, pour divers types d’événements et styles de musique. Je travaille maintenant autant en enregistrement qu’en sonorisation. La formation en lancement d’entreprise que j’ai suivie il y a quelques années m’a permis de bien maîtriser les outils utiles pour m’aider à gérer tous les aspects du travail autonome.   

Question
À quoi ressemble une journée type de travail?
Réponse

Les journées de travail peuvent différer selon les types de contrats que j’ai. Toutefois, la journée débute souvent avec le montage de la salle et des équipements. Je dois effectuer les différents branchements et m’assurer que tout est fonctionnel. Vient par la suite le test de son qui est effectué avec les musiciens ou le conférencier selon le type d’événement. En fonction du moment de la journée où est effectué le test de son, je peux avoir quelques heures libres avant le spectacle. Par la suite, je dois revenir à la salle pour effectuer la sonorisation tout au long de l’événement. Finalement, lorsque tout est terminé, il faut procéder au démontage de l’équipement de sonorisation, et, selon les contrats, des autres éléments de la scène au besoin (ex. : lors de spectacles de grande envergure tels que ceux ayant lieu dans des amphithéâtres ou dans les centres des congrès).  

Question
Qu’est-ce que vous aimez le plus et le moins dans votre travail?
Réponse

Je suis un passionné de musique, par conséquent, l’univers des sons, c’est ce que je préfère dans mon métier. J’ai souvent l’impression de ne pas travailler, mais plutôt de m’adonner tout simplement à ma passion.  J’aime aussi beaucoup les contacts que mon travail me permet d’avoir avec les musiciens. Le fait qu’il y ait des périodes plus achalandées et d'autres moins durant l’année est quelque chose que j’apprécie. Étant une personne qui a toujours beaucoup de projets en tête, les périodes plus tranquilles me permettent de me réaliser dans des domaines autres que la sonorisation, dont celui de l’ébénisterie.  

Les horaires atypiques font partie des éléments que j’aime le moins. Mon horaire est établi en fonction des contrats que j’ai et des moments où les spectacles sont présentés. Il est possible, par exemple, que je termine le démontage pour un contrat à deux heures du matin et que je doive en recommencer un autre le lendemain matin à huit heures. De plus, en oeuvrant dans l’industrie du spectacle, je me retrouve souvent à travailler dans les moments où la plupart des gens sont en congé, c’est-à-dire les soirs et les fins de semaine. Finalement, dans le monde du spectacle, il faut parfois travailler avec des personnes qui ont des attitudes avec lesquelles nous ne sommes pas nécessairement en accord, ce qui n’est pas toujours évident.  

Question
Quels sont les aspects méconnus de votre profession?
Réponse

Je crois que ce qui est méconnu, c’est le métier en tant que tel! Les gens ne sont pas conscients de tout le travail complexe qui s’effectue à l’arrière de la scène lors d’un spectacle. Il n’y a pas de spectacle sans nous. En fait, lorsqu’un spectateur remarque les aspects techniques de la présentation, c’est que le travail n’est pas effectué adéquatement. Notre objectif est que tout fonctionne parfaitement sans que les gens remarquent quoi que ce soit. 

Les gens ont aussi tendance à penser que le technicien du son ne fait que s’occuper de la console. Dans les faits, nous sommes des techniciens de scène spécialisés dans le son. Donc nous travaillons également au montage de la scène et il n’est pas rare que nous donnions un coup de main pour le montage de l’éclairage ou de la vidéo, surtout pour les spectacles avec des équipes réduites. On doit donc avoir des connaissances de base dans tous les départements liés à la technique de scène. 

Finalement, la technologie a beaucoup évolué au fil du temps dans le domaine de la sonorisation. Il est maintenant facile d’avoir son propre studio d’enregistrement à la maison. Les équipements sont de plus en plus petits et plus accessibles qu’auparavant. Pour cette raison, plusieurs personnes s’improvisent techniciens du son alors qu’elles n’ont pas de formation ou une expérience significative dans le domaine.  Les professionnels du milieu ont une expertise et un bagage bien plus larges que ce que l’on pourrait penser. C’est comme pour la cuisine, tout le monde est capable de cuisiner un délicieux repas dans le confort de son foyer, par contre, faire la cuisine dans un grand restaurant soir après soir… c’est une autre paire de manches. 

Question
Qu’est-ce que vous diriez à une personne qui désire faire ce choix de carrière?
Réponse

Je dirais à cette personne qu’il ne faut pas avoir peur de foncer pour faire sa place dans le domaine et qu’il faut être à l’aise avec les horaires atypiques et la rémunération au contrat. Une bonne oreille est importante pour distinguer les sons et déceler les subtilités afin de détecter les problèmes et de procéder à un ajustement optimal du son. Il faut être capable de bien gérer son stress, de garder son sang-froid lorsqu’un pépin survient lors d’un spectacle et de faire preuve de débrouillardise et d’ingéniosité pour le résoudre. On doit aussi être en mesure d’user d’un peu de psychologie afin de rassurer certains artistes qui peuvent être très stressés avant ou même pendant une prestation.   

Une bonne force physique est nécessaire pour transporter des équipements qui sont parfois assez lourds. Les longues heures de travail qu’exigent certains contrats nécessitent une bonne endurance physique. De plus, il est important de faire preuve de professionnalisme, car nous sommes appelés à travailler dans toutes sortes d’événements différents, et ce, avec une grande variété de clientèles (spectacles, conférences de presse, congrès, enregistrements, etc.).   

Avoir une formation dans le domaine est un atout indéniable. Il est cependant important d’être curieux et de vouloir continuer à apprendre. Finalement, ne pas hésiter en début de carrière à accepter un poste de technicien de scène en général pour se familiariser avec toutes les sphères du monde du spectacle afin de devenir plus polyvalent et ainsi augmenter les possibilités d’emploi.   

Entrevue réalisée par Julie Gauvin, c.o.