La profession de sergent-détective est représentée à maintes reprises dans diverses séries télévisées. De notre côté, nous avons eu la chance de rencontrer Patrick Binet, sergent-détective au Service de police de la Ville de Repentigny. Il a accepté de nous parler de son cheminement et de son quotidien au travail.
Lorsque j’étais arbitre au hockey, un des responsables de la ligue était policier pour le Service de police de la Ville de Québec. Il me parlait souvent de son métier. À cette époque, j’étais attiré par le domaine de l’infographie étant donné le côté artistique de ma personnalité, mais cette rencontre m’a amené à me questionner sur mon choix car j’aimais le contact avec les gens et l’activité physique que l’on retrouvait dans le métier de policier. L’admission en Techniques policières étant contingentée, l’acceptation de ma demande dans ce programme a été révélatrice pour moi. C’est à ce moment que j’ai vraiment fait mon choix. Une fois sur le marché du travail, j’ai débuté comme policier-patrouilleur pour ensuite devenir sergent de patrouille. Ce n’est qu’après une dizaine d’années que je suis devenu enquêteur au Service de police de la Ville de Repentigny. Je n’avais pas envisagé cette possibilité au départ, c’est tout simplement une évolution dans ma carrière.
Bien que je sois spécialisé en crimes de nature économique, j’effectue des enquêtes sur différents types de dossiers tels qu’un meurtre intrafamilial, une introduction par effraction avec vol dans une résidence, un vol de véhicule, etc. Peu importe la nature du dossier, une bonne partie de mon travail consiste à rédiger des documents sous forme légale pour accéder à toute information personnelle sur les victimes ou les suspects. Lors d’une plainte pour fraude par carte ou par ordinateur, par exemple, je transmets une demande à la compagnie bancaire impliquée sous forme d’affidavit ou d’ordonnance afin d’obtenir la preuve que je recherche au sujet de la transaction frauduleuse effectuée dans le compte de banque de la victime. Une fois cet élément reçu, cela pourra m’amener à investiguer par la suite auprès d’une compagnie de téléphone car la fraude peut avoir été commise à partir d’une adresse IP. Je devrai alors produire une nouvelle demande de renseignements pour trouver à qui elle appartient. Une preuve m’amène à en chercher une autre jusqu’à ce que j’ai obtenu tous les éléments nécessaires à l’enquête. Ce processus nécessite du temps, il peut s’écouler un an avant que mon dossier soit complet. Une enquête est un travail d’investigation et de réflexion. Je travaille principalement au bureau devant un écran d’ordinateur où je traite divers dossiers simultanément et je vais sur la route, par exemple, pour faire une filature ou pour me rendre sur une scène de crime lorsque survient un événement. Je fais également des interrogatoires pour tenter d’obtenir des aveux des personnes suspectées d’avoir commis un délit.
L’horaire de travail régulier, en semaine, constitue un avantage important pour la vie de famille et la vie sociale. L’équilibre entre les différents aspects de ma vie était plus difficile à atteindre lorsque j’étais policier-patrouilleur, car je travaillais le jour, le soir et la nuit. De plus, je ne suis plus dans l’urgence de réagir aux événements et de répondre à des appels. J’ai donc davantage de temps pour réfléchir, pour récolter mes preuves et pour prendre des décisions. On investit beaucoup d’énergie et de temps pour aider les gens et je pense souvent au travail quand j’arrive à la maison. En tant qu’enquêteur, mon rôle consiste à monter un dossier de preuves bien étoffé. Je n’ai aucun contrôle sur l’accusation ou non d’un suspect. Ce sont des gens à un autre niveau du système de justice qui ont ce mandat.
Être enquêteur, c’est un travail beaucoup plus mental que physique. Au lieu de m’entraîner pour courir après un malfaiteur, je dois me garder à jour avec des formations qui portent, entre autres, sur les nouvelles technologies qui sont utilisées pour commettre des crimes. On peut interroger un suspect pendant plusieurs heures, jouer un rôle devant lui et être stratégique afin de le faire parler mais même si on déploie de grands efforts, la personne ne fera pas nécessairement des aveux. De plus, le travail effectué dans une enquête a une utilité qui va au-delà d’un dossier spécifique. L’ensemble des preuves et des renseignements est répertorié dans le Système automatisé de renseignements criminels (SARC) qui peut être consulté par les policiers lorsqu’ils font des recherches sur un individu. Donc même si une personne n’est pas accusée dans un premier délit, elle pourrait l’être dans un second cas avec des informations que j’ai recueillies lors d’un autre événement.
Être policier, c’est une vocation. Un certain soir, en revenant du travail, j’ai dû faire face à un vol à mains armées alors que je faisais la file à la caisse dans un commerce. Lorsque le malfaiteur a pointé la caissière avec son fusil et a tiré au plafond, j’ai constaté que c’était une balle à blanc et je suis intervenu. Je l’ai désarmé, fouillé et immobilisé jusqu’à l’arrivée des autres policiers appelés par les témoins de la scène. On ne peut jamais vraiment oublier qu’on est policier. Le désir d’aider les gens et de rendre service doivent être les principales raisons qui attirent quelqu’un vers ce métier. Avoir de l’empathie est très important pour comprendre la personne qui a besoin d’aide tout en étant capable de faire son travail et de faire respecter les règles. Ce qui est prédominant dans notre métier, c’est le côté humain. De plus, une bonne capacité d’adaptation est nécessaire car chaque personne est différente et les dossiers ne se gèrent pas tous de la même façon. Finalement, il faut faire preuve d’une grande ténacité afin de toujours pousser plus loin l’investigation.